ESTAMPES JAPONAISES

En ces temps maussades et votre plus grande disponibilité en ‘intérieur’, j’ai décidé de reprendre mes occupations premières : l’histoire de l’art asiatique et plus particulièrement le Japon qui nous emmène jusque l’année prochaine avec des sujets aussi divers que les jardins, le zen dans l’art, la peinture…

Je commencerai par quatre conférences sur les grands maîtres de l’estampe en relation, notamment, avec la nature que sont Hokusai et Hiroshige. 

Ce seront des conférences via écran d’ordinateur interposé. Il suffit de télécharger une application de manière à se connecter à heure et jour choisis (les dimanches 8, 15, 22, 29 novembre à 15h00). Votre écran sera occupé par les estampes en excellente résolution et une fenêtre dans le haut de l’écran me permet de les commenter. Vous pourrez même intervenir en posant des questions.

Il vous suffit de m’envoyer un mail et je vous donnerai les informations pratiques.

fa217497@skynet.be

Je vous livre ici deux extraits concernant les deux peintres de l’estampe dont je décortiquerai la vie et l’oeuvre, parfois croustillante concernant Hokusai (il y aura même quelques estampes érotiques mais je me demande si je vais pas les proposer vers minuit…).

Une oeuvre magique et émouvante est celle-ci. 

Ultime peinture sur soie réalisée trois mois avant la mort de Hokusai, comme un testament visuel et un autoportrait à la fois, le ‘vieux tigre dans la neige’.

Le félin semble suspendu dans les airs toutes griffes dehors auxquelles font écho les feuilles de bambou à moitié recouvertes de neige. C’est la nuit et il fait silence comme si la neige avait absorbé le moindre son. La fourrure est traitée avec des contours réduits au maximum et l’utilisation de couleurs mates nettement définies procurent un effet de cloisonné comme sur les estampes.

Le regard du tigre est intense, son sourire narquois, mais on ne sait pas ce qu’il regarde ni où il va ou alors est-ce vers le ciel et l’infini ?

La peinture est signée :

Mois du tigre, année du coq, vieux Manji, le vieil homme fou de peinture âgé de 90 ans.

Hiroshige est à la fois différent et complémentaire de Hokusai. Il incarne le mieux le rapport qu’entretiennent les Japonais avec la nature.

Dans sa série, les 53 étapes de la Tokaido, cette fameuse route qui relie Tokyo à Kyoto, en voici une que je mets en rapport avec celle de Hokusai sur le thème de la neige. ‘Neige à Kanbara‘.

Cette estampe est l’une des plus représentatives, et des plus connues, de la sensibilité d’Hiroshige pour la complémentarité de la nature et de l’homme qui en fait partie intégrante. Il existe une harmonie indissoluble entre l’intériorité, l’attitude contemplative de ce vieil homme appuyé sur sa canne, la tête cachée sous l’ombrelle à moitié fermée à l’heure où les bruits s’apaisent, et la soirée qui s’avance à pas feutrés alors que la neige rend imperceptible le mouvement des deux personnages sur la droite. La lumière, les sons, la vitalité. Tout cela semble absorbé par une nature entrée en dormance passagère. Les choses et les gens retiennent leur souffle comme le ma, ce lien entre l’espace et le temps arrêté. Nous avons presque une sensation physique du silence dans un monde irréel. Serait-ce là une représentation du vide qui n’est pas ‘rien’ ? Ce silence et ce vide qui permet de discerner une plus grande beauté à l’intérieur de soi. 

Extraordinaire…. dans cette réédition, Hiroshige fait le contraire et propose une seconde version. La nuit semble monter du village et envahit le ciel, ce qui semble avoir mieux plu aux acheteurs.

Tout n’est-il pas qu’illusion ? Il neige très rarement à Kanbara. Ce paysage est donc le fruit de l’imagination d’Hiroshige.